Le 18 février 2016 marque le 33e anniversaire de l’un des pires génocides commis en Inde après 1947 contre les musulmans d’Assam, à savoir le massacre de Nellie. Trois décennies se sont écoulées, et pas même un seul agresseur n’a jusqu’à présent été condamné ou poursuivi, pour cette atrocité odieuse.
Le 18 février 1983, dans le centre de l’Assam, officiellement 1819 et officieusement plus de 3000 musulmans ont été chassés de leurs maisons et massacrés dans les champs de Nellie et de 13 autres villages par une foule portant des fusils et des machettes de campagne. Des maisons ont été rasées et des champs ont été détruits. Un nombre important de ceux qui sont morts ce jour-là étaient des femmes, des enfants et des personnes âgées qui ne pouvaient pas courir assez vite pour sauver leur vie.
Massacre de Nellie, 1983: un crime de haine contre les musulmans
Qu’est-il arrivé?
Il y a plusieurs raisons attribuées au massacre de Nellie, mais la principale raison serait les élections à l’Assemblée de 1983 qui ont agité les militants de l’All Assam Students Union (AASU). Les membres de l’AASU souhaitaient l’expulsion de tous les soi-disant «migrants illégaux» d’Assam et le retrait de leur nom de la liste électorale. Malgré la résistance massive de groupes comme l’AASU et le grand public, le gouvernement central de l’Inde de l’époque a décidé de convoquer des élections à l’Assemblée en Assam en février 1983.
En réponse, l’AASU a demandé à la population d’Assam de boycotter les élections. Stimulés par le fait qu’ils étaient visés par l’agitation anti-étrangère, les musulmans de tout l’État ont décidé d’ignorer le boycott et ont voté le 14 février 1983. Pour eux, voter était leur droit – tel que garanti par la Constitution indienne.
Ce défi servirait plus tard de cause immédiate au massacre.
Le rôle du gouvernement
Il faut laisser ces événements suivre leur propre cours avant d’intervenir.
Cette remarque a été faite par le Premier ministre de l’époque, Indira Gandhi, en réponse au Financial Times, lorsqu’on lui a demandé pourquoi elle n’avait pas agi plus tôt pour mettre fin à la violence. Le plus grand échec de son gouvernement a été d’organiser des élections dans une situation déjà instable. La police et le personnel du CRPF ont été postés dans des bureaux de vote et se sont occupés à assurer la sécurité des candidats aux élections; les forces de l’ordre étaient inopérantes à Assam à cette époque. Bien sûr, les représentants du gouvernement se sont rendus plus tard dans les camps de réfugiés pour leur propre agenda politique et ont beaucoup parlé d’ouvrir une enquête sur la violence (alors qu’en réalité, ils n’ont même pas déposé l’un des documents les plus discutés concernant Nellie Massacre – le rapport de la Commission Tewary). Le rapport n’a pas été rendu public.
Le rôle des médias
Les médias indiens ont choisi de garder un silence visible sur le massacre de Nellie, à quelques exceptions près comme la monographie d’Hemendra Narayan intitulée 25 ans après… Nellie Still Haunts qu’il a écrite 25 ans après le massacre. Pour citer Narayan:
C’était une libération pour moi. Il y avait quelque chose dans ma tête et j’ai dû le relâcher. Les gens m’ont demandé pourquoi après vingt-cinq ans? J’ai dit que je vivais avec et maintenant je devais m’en remettre (en écrivant à ce sujet).
La sociologue japonaise Makiko Kimura a mené la toute première recherche sociale approfondie sur le massacre, mais le gouvernement Assam ne lui a pas permis de présenter son document, car Nellie était considérée comme une question sensible. Elle est également l’auteur d’un livre intitulé The Nellie Massacres, 1983: Agency of Rioters.
Conclusion
Les incidents de Nellie ne sont qu’une autre entité de la longue liste des génocides contre les musulmans. Même après des tentatives répétées de balayer cet acte de xénophobie sous le tapis par le système juridique inefficace, les médias indifférents et les décisions politiques inefficaces, il continuera de refaire surface et sa mémoire persistera. À l’heure actuelle, les victimes de ces violences attendent toujours que justice soit rendue, ou du moins, la reconnaissance de l’incident grotesque qui a laissé une blessure trop profonde pour guérir.
Lectures complémentaires
Une honte incalculable – Tehelka
Revisiter le massacre de Nellie de 1983 – Academia.edu
Ce point de honte – l’Hindou
En souvenir du massacre de Nellie du 18 février 1983 – Deux cercles
Mémoire et oubli à Nellie – Livemint